Voilà qui jette une lumière crue sur les conséquences inhumaines d’une politique qui persiste à maintenir le mythe, néfaste à bien des égards pour la France et l’Union Européenne, de la fermeture des frontières à une immigration désormais qualifiée de « subie » et conditionne l’aide au développement, en faveur des pays d’origine ou de transit du sud ou de l’Est de la Méditerranée, à leur docile participation à la chasse aux « Subsahariens » ou autres migrants fuyant la misère et/.ou les sanglants conflits du Moyen-Orient. Les « accords de réadmissions » et la délivrance de laissez-passer consulaires en sont les pierres angulaires.
Année après année - hier par le ministre de l’Intérieur, aujourd’hui par celui en charge du nouveau ministère « de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-développement » - sont publiés les objectifs chiffrés annuels, fixés aux préfectures et aux services de police, en matière de reconduite à la frontière : 15 000 pour 2004, 20 000 pour 2005, 25 000 pour 2006.
Pour ce qui est de 2007, M. Brice Hortefeux fait état de sa volonté de procéder à 125. 000 interpellations pour aboutir à 25.000 reconduites à la frontière. En 2004, dans son rapport annuel sur la situation des centres et locaux de rétention administrative, la CIMADE écrivait : « Nous voyons chaque jour un peu plus l’inacceptable. Il est de notre devoir aujourd’hui - ne pas parler serait cautionner - de dire haut et fort que trop, c’est trop ! ». « Quand on commence à "gérer" l’expulsion de personnes comme une usine gère et prévoit sa production, on peut s’attendre au pire. Et le pire arrive ». « Il faut arrêter cette "politique du chiffre". Il y a urgence ».
Outre la chasse au « clandestin » et les « rafles » généralisées, conséquences inéluctables de tels objectifs, cette politique fait des lieux de rétention de véritables « camps », à la charge d’une administration tenue de gérer même l’ingérable, sans en avoir les moyens. Combien de sinistres erreurs lors d’interpellations d’étrangers à leur domicile ou dans la rue, enregistrées et dénoncées par la CIMADE dont les juristes, présents en centres de rétention, ont identifié parmi les retenus des personnes non-expulsables, en situation régulière ou de nationalité française !
A l’occasion de ce nouveau drame de Bordeaux, Me Pierre Landete, président de l’Institut de Défense des Étrangers - IDE, s’est élevé contre la longueur de la rétention (portée de 12 à 32 jours par la loi Sarkozy du 26 novembre 2003), a dénoncé "le placement systématique en centre de rétention" et demandé "l’arrêt de pratiques illégales comme le menottage" des retenus. Les CRA, centres de rétention administrative, n’ont plus à envier désormais aux établissement pénitentiaires, qualifiés en 2000 d’ « oubliettes de la société » dans un rapport du Sénat et de « honte pour la République » par le rapport de l’assemblée nationale.
Le MRAP, membre de la campagne « Migrant, pas Esclave », réaffirme avec force l’urgente nécessité de la ratification par la France de la convention des Nations Unies « pour les droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs famille » du 18 décembre 1990. Une telle initiative contribuerait de façon significative au respect des droits fondamentaux de tous les migrants, en assurant leur protection contre toutes formes de discriminations, d’exploitations et de violences physiques et morales tout au long du parcours migratoire.
Communiqué du Conseil d’Administration du MRAP
16 juin 2007
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire