LEMONDE.FR | 18.10.07 | 15h11 • Mis à jour le 18.10.07 | 15h11
El Watan, qui y consacre un long article commémoratif, rappelle que ce 17 octobre 1961, une manifestation pacifique visant à dénoncer le couvre-feu imposé à ceux que l'on appelait alors, souvent "dans une ambiance de haine", des "musulmans", se solda par 200 à 300 morts, passés à tabac, tués ou jetés dans la Seine, 3 000 blessés, 11 500 arrestations suivies le lendemain par celles de 1 000 femmes et 500 enfants.
Pourtant, souligne Le Soir d'Algérie, "nous sommes encore officiellement à deux morts", et à cinq pour la presse de l'époque, qui ne brilla pas particulièrement par son indépendance, à l'image de France Soir, qui n'hésita pas à affirmer : "La ville aux mains des musulmans". Titrant "La reconnaissance officielle tarde à venir", El Watan évoque lui aussi le rôle des médias qui, après avoir essentiellement relayé les informations de la préfecture, ont rapidement été censurés, avant que ne s'installe "la chape de plomb et l'occultation".
"NI VENGEANCE, NI REPENTANCE"
"L'inacceptable, c'est que quarante-six ans après les faits, aucune reconnaissance officielle des massacres n'est venue de la part de l'Etat français", tempête l'écrivain et réalisateur Mehdi Lallaoui, président de l'association Au nom de la mémoire, qui ne réclame "ni vengeance ni repentance, simplement reconnaissance de la vérité historique". Michel Reynaud, membre fondateur des éditions Tiresias, met, quant à lui, scandalisé, en parallèle la réhabilitation de l'OAS d'un côté, et l'absence d'indemnisation des victimes de l'autre.
Le Maghreb s'indigne pour sa part du fait que Maurice Papon, alors préfet de police de Paris, soit mort dans l'impunité sans être jugé "pour ses responsabilités écrasantes lors du massacre", qualifié de "crime d'Etat", du 17 octobre 1961, le pire, à Paris, depuis le massacre de la Saint-Barthélémy en 1572. Pour le Quotidien d'Oran, la situation n'est pas prête de s'améliorer : "à moins que d'hypothétiques archives encore frappées par le délai centenaire ne 'parlent' un jour, sa disparition, le 17 février 2007, enterre à jamais les secrets d'Etat d'un des chapitres les plus douloureux de la séquence coloniale".
"La France reconnaîtra tôt ou tard ses crimes contre le peuple algérien", a déclaré pour sa part le ministre des Moudjahidine lors de la célébration du 46e anniversaire de la journée nationale de l'émigration : "Ce n'est qu'une question de temps." Le quotidien El Moudjahid précise également que des commémorations ont eu lieu à Saint-Denis, Bagnolet, Clichy-la-Garenne, Lille, La Courneuve et aussi à Paris, mais que, selon Mouloud Aounit, président du Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP), "le silence sur cette période pèse toujours sur les millions d'immigrés d'Algérie et leurs enfants" et que "l'amnésie et le refoulement favorisent l'amertume, les frustrations, les rancœurs, les violences et encouragent le racisme anti-algérien". Guy Marin, conseiller du maire de Vitry, qui vient d'inaugurer une stèle en hommage aux victimes du massacre, avance pour sa part que "la France a un devoir de vérité sur ce crime contre l'humanité".
Jean Marc Manach
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