«Les “avancées” en faveur du Parlement sont mineures ou inconsistantes, quand elles ne sont pas des leurres» analyse Jonathan Sapène, membre de la Convention pour la 6ème République (C6R), sur le site altercomite.c6r.fr. Il décline “cinq bonnes raisons” pour les élus de voter contre le projet de révision constitutionnelle tel qu’il a été approuvé le 3 juin. Extraits.
«Les “avancées” en faveur du Parlement sont mineures ou inconsistantes, quand elles ne sont pas des leurres» analyse Jonathan Sapène, membre de la Convention pour la 6ème République (C6R), sur le site altercomite.c6r.fr. Il décline “cinq bonnes raisons” pour les élus de voter contre le projet de révision constitutionnelle tel qu’il a été approuvé le 3 juin. Extraits.
Jonathan Sapène. «1. Les dérives présidentialistes de la Ve République sont renforcées. Le projet accentue le déséquilibre de notre régime au profit du président de la République. Sous couvert de responsabiliser politiquement le Président, ce qui est juridiquement faux, le texte lui permet de dicter directement ses projets à un Parlement qui demeure dans une situation de soumission institutionnelle. Le Président de la République accroît subrepticement son pouvoir gouvernant au détriment du Premier ministre sans en subir la contrepartie : le contrôle parlementaire.
2. Les “avancées” en faveur du Parlement sont mineures ou inconsistantes, quand elles ne sont pas des leurres. Même si l’on note quelques “avancées” en faveur du Parlement (notamment l’augmentation du nombre de commissions parlementaires, le partage de l’ordre du jour avec le gouvernement et la discussion des textes adoptés en commission), le projet ne bouleverse pas fondamentalement le système de la Ve République, faute notamment de reconnaître un véritable rôle d’initiative et de contrôle à l’opposition parlementaire, et contient nombre de dispositions potentiellement dangereuses pour les parlementaires (comme sur le droit d’amendement). Bon nombre des mesures censées limiter les pouvoirs du gouvernement sont des leurres. C’est le cas, très significatif, de la prétendue limitation du recours à l’article 49/3 par le Premier ministre (qui permet à ce dernier de faire adopter une loi sans vote à l’Assemblée nationale). En réalité, l’expérience des dix dernières années montre que les gouvernements successifs ont utilisé cette possibilité moins d’une fois par session. C’est le cas aussi du prétendu contrôle parlementaire sur les nominations présidentielles (la majorité des 3/5èmes pour s’opposer aux candidats présidentiels est en pratique inatteignable) ou sur les opérations militaires extérieures (alors que le Parlement n’a toujours pas le droit d’être informé des accords de défense avec nos partenaires étrangers).
3. Notre Constitution est toujours aussi peu citoyenne. Le Conseil constitutionnel (dont la composition politicienne est inchangée) peut être saisi par les justiciables, un “défenseur des droits des citoyens” est institué (mais ses attributions sont floues et pourraient masquer l’affaiblissement d’institutions existantes, comme la CNIL), un référendum “d’initiative populaire” est institué (mais il ne peut être engagé que par les groupes parlementaires dominants et peut être facilement évité par le Premier ministre) : les progrès sont bien maigres. Le projet enterre des questions autrement importantes : un véritable référendum d’initiative populaire, l’initiative législative citoyenne, le droit de vote des étrangers, etc. Il refuse de traiter un enjeu essentiel : le pluralisme dans les médias.
4. De façon générale, les dispositions du projet sont imprécises et floues, ou renvoient à des textes ultérieurs dont on ignore les orientations. Le projet ne contient pas la réforme, il la promet. On dénombre au total pas moins de 17 renvois à des textes d’application ultérieurs, soit près de la moitié du nombre d’articles de la Constitution touchés par la réforme. Or on ignore tout des décisions qui seront prises, de leurs orientations et de leur contenu. Le projet est en fait un blanc-seing accordé au gouvernement et à sa majorité l’autorisant à réformer les institutions, sans aucune garantie quant à ses intentions réelles.
5. Les principales anomalies démocratiques ne sont pas corrigées. C’est le cas d’abord du Sénat qui, en raison de son mode de désignation, ne représente absolument pas la nation française, alors qu’il possède le pouvoir de bloquer la modernisation de nos institutions. C’est le cas, ensuite, du cumul des mandats. 85% des parlementaires français cumulent plusieurs mandats, contre 10% en Allemagne et 13% en Grande-Bretagne. Or le cumul des mandats, au-delà de la question morale qu’il pose (l’élu qui ne se consacre pas pleinement au mandat qui lui a été confié par les électeurs ne trahit-il pas leur confiance?), est un obstacle majeur à la modernisation politique de notre pays.»
source:http://contrejournal.blogs.liberation.fr/mon_weblog/2008/06/rforme-des-inst.html#more
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