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Comment les banques françaises utilisent-elles les fonds que l'Etat leur a prêtés depuis octobre? Et font-elles de leur mieux pour soutenir l'économie française en accordant des prêts aux entreprises et aux particuliers, comme elles s'y sont engagées? C'est en substance à ces questions que les représentants des six grands établissements bancaires français (Banque populaire, BNP-Paribas, Caisse d'épargne, Crédit agricole, Crédit mutuel-CIC et Société générale) étaient invités à répondre cet après-midi devant la commission des Finances de l'Assemblée nationale.
Car, ainsi que l'a précisé le président de cette dernière, Didier Migaud (PS), après avoir souligné que «les banques françaises sont saines mais ont besoin de fonds», «les citoyens peuvent avoir l'impression que l'on récompense indûment des acteurs qui ont eu un fonctionnement désastreux». Et le député de l'Isère de souligner certains «paradoxes»: «On vous entend dire que vous prêtez beaucoup aux particuliers et aux entreprises, et pourtant l'économie ralentit...»
Jérôme Cahuzac, député (PS) du Lot-et-Garonne: «Quand on va dans nos circonscriptions, on entend des chefs d'entreprise dire qu'ils rencontrent des difficultés considérables pour obtenir des encours bancaires. Il faut cesser ces comportements arrogants!»
«Boucs émissaires»
Première explication des banquiers, unis comme un seul homme lors de cette séance: leur image a été ternie par une crise financière dont ils ne sont pas responsables. «Nous passons pour des gens à qui on ne peut pas faire confiance, dit Etienne Pfimlin, président du Crédit mutuel. Mais cette image de boucs émissaires ne correspond pas à la réalité du terrain.»
Deuxième argument avancé: la population est apeurée par la crise et, de ce fait, ne sollicite plus guère de prêts. «Chez nous, les demandes de crédit sont en baisse de 50%», avance Georges Pauget, directeur général du Crédit agricole. «Les crédits à l'habitat ont chuté de 25%, renchérit Etienne Pfimlin. Les clients attendent la baisse des prix des biens immobiliers.» «La distribution des crédits se fait, mais de façon responsable. Et elle dépend de l'existence d'une demande, justifie Baudouin Prot, directeur général de BNP-Paribas. Mais c'est vrai que la demande de prêts personnels baisse. Il y a une très forte baisse dans la demande liée à l'habitat.»
Et dans ce concert à la tonalité impeccablement travaillée et réglée côté banquiers, l'intervention de l'Etat est saluée par tous. «La situation en terme de liquidités est nettement meilleure qu'en octobre», affirme Frédéric Oudéa, directeur général de la Société générale. Baudouin Prot: «L'argent prêté l'est à des prix justifiables.»
«Sérieux» et «responsables»
Dernière thématique sur laquelle les banquiers sont à l'unisson: le caractère extrêmement sérieux de leurs établissements. «Nous, nous n'avons jamais eu recours à la titrisation, système sur lequel repose 60% de l'économie américaine et 50% de l'économie britannique, avance Baudouin Prot. Le dispositif français sur les prêts est efficace. La distribution des crédits se fait de façon responsable.» «Si les Français sont moins endettés qu'à l'étranger, c'est que nous, régulateurs, avons été exigeants dans le passé», plastronne, pour sa part, Frédéric Oudéa.
Bref, à les écouter, tout va pour le moins mal en France dans un contexte international nettement plus abîmé. Et, preuve ultime de leur probité, selon le représentant de la Caisse d'épargne: «Les deux dirigeants majeurs [de sa banque, ndlr] vont renoncer à leurs bonus pour 2008.»
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