07/12/2010

Lyon : Les identitaires dans la rue le 8 décembre....

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Les identitaires dans la rue le 8 décembre....


« Lugdunum suum III » [1], c’est sous ce « mot d’ordre » que les militants d’extrême-droite lyonnais défileront pour la troisième année consécutive dans les rue de lyon, au milieu de la foule du 8 décembre. La manifestation, censée ramener le 8 décembre à son « sens historique » (sic) ne sera bien sûr pas étiquettée publiquement « Rebeyne » ou « Identitaire » et évidemment ils n’affirmeront pas cette appartenance au milieu de la foule.
Le 8 décem­bre
Si le 8 décem­bre est aujourd’hui la vitrine mer­can­tile de la ville de Lyon (l’événement est orga­nisé par la mairie depuis 1989), la tra­di­tion popu­laire est pré­sente depuis bien plus long­temps, même si elle n’a jamais pris l’ampleur que cer­tains et cer­tai­nes vou­draient lui donner, ni l’ancien­neté qui lui est sou­vent prêtée.
Loin de remon­ter jusqu’aux épidémies de peste du XVIeme siècle comme cer­tains l’affir­ment par­fois, c’est l’inau­gu­ra­tion d’une statue à la basi­li­que de Fourvière en 1852, à l’ini­tia­tive et payée par les bour­geois et nota­bles réac­tion­nai­res de la ville, qui marque le début de cette « tra­di­tion » qui n’a donc rien de popu­laire à l’ori­gine, puis­que le groupe social à l’ini­tia­tive de la statue entre­te­nait dans le même temps l’exploi­ta­tion des canuts et appe­lait à leur répres­sion.
Le sens reli­gieux a depuis long­temps dis­paru en dehors des pro­ces­sions orga­ni­sés par le dio­cèse de Lyon, les­quel­les ne ras­sem­blent plus que quel­ques dizai­nes de per­son­nes.
Les Identitaires ne se joi­gnent pas à la pro­ces­sion chré­tienne mais orga­ni­sent une mani­fes­ta­tion sépa­rée. Le néo-paga­nisme irri­gue en effet depuis long­temps déjà leur cou­rant poli­ti­que, entre­te­nant des oppo­si­tions avec le reste de l’extrême-droit catho­li­que. Pour appa­raî­tre le 8 décem­bre, ils met­tent donc en avant l’aspect tra­di­tion­nel et pré­ten­dû­ment popu­laire d’un événement pour­tant bour­geois et reli­gieux... mais pas­sons, leur but est avant tout de pro­fi­ter de la foule pour se faire voir, et faire par­ti­ci­per des per­son­nes qui ne les rejoin­draient pas si les idées poli­ti­ques des Identitaires s’expri­maient au grand jour lors de cette mani­fes­ta­tion.
« Les petits Lyonnais »
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La manifestation « lugdunum suum » en 2009
Créée en 2008, cette énième émanation des Identitaires sert avant tout à orga­ni­ser cette mani­fes­ta­tion. A part cette der­nière, elle ne compte à son actif qu’un net­toyage de plaque com­mé­mo­ra­tive et des arti­cles sur l’his­toire lyon­naise (sou­vent très orien­tés) publiés également sur Novopress, Fdesouche ou le site Rebeyne. L’URL du site de cette asso­cia­tion (Culturelyon, pré­sente sur les tracts) ren­voie en réa­lité sur un blog de l’héber­geur Haut et fort, lequel est notam­ment connu pour héber­ger de très nom­breux blogs d’extrême-droite, et entres autres le pre­mier site des Identitaires à Lyon, car comme d’habi­tude, il s’agit d’une asso­cia­tion para­vent.
La stra­té­gie n’est pas neuve pour les Identitaires : faire venir du monde à leur idées par du cultu­rel (cari­ca­tu­ral), du spor­tif (combat uni­que­ment), de l’asso­cia­tif (rare­ment au délà de la décla­ra­tion de façade) ou, à la limite, de l’huma­ni­taire (pure­ment sym­bo­li­que et sur-média­tisé par leur soin). Ce qu’ils appel­lent de la méta-poli­ti­que (sic !) reste avant tout une façon un peu hon­teuse de ne pas mon­trer ce qu’ils sont vrai­ment.
Les Identitaires aime­raient d’ailleurs faire croire que leurs idées sont cou­ran­tes parmi la popu­la­tion. Dans ce but, ils mul­ti­plient les struc­tu­res de façade pour leurs diver­ses acti­vi­tés pour faire croire à un réel foi­son­ne­ment de leur milieu poli­ti­que. De novo­press [2], agence de presse fic­tive des iden­ti­tai­res, à SDF (« Solidarité des Français » sic) ou encore « Solidarité Kosovo », les grou­pes sont légions mais regrou­pent tou­jours les mêmes per­son­nes. Et faire le tour des bureaux décla­rés de cha­cune de ces asso­cia­tions ou des per­son­nes déte­nant les droits des sites inter­net cor­res­pon­dants est une véri­ta­ble partie de rigo­lade : les mêmes noms se sui­vent, voire s’échangent d’une région à l’autre.
Une anec­dote illus­tre bien notre propos : une nou­velle émanation iden­ti­taire orga­nise à Lyon il y a quel­ques temps un apéro « face­book » sau­cis­son et pinard, mais veut faire croire à une ini­tia­tive popu­laire qui ne soit pas pré­pa­rée par des mili­tants. Les orga­ni­sa­teurs dudit apéro prévu dans le quar­tier de la Guillotière, sont inter­viewés par France 3. Parmi les per­son­nes inter­viewées se trouve un rou­quin reconnais­sa­ble et bien connu pour faire partie de la direc­tion lyon­naise de « Rebeyne ». Il s’en cache bien pen­dant l’inter­view, et lors­que le jour­na­liste, l’ayant reconnu, le ques­tionne sur son statut au sein des Identitaires et donc le rap­port de son groupe poli­ti­que avec l’ini­tia­tive, il refuse de reconnaî­tre les faits, bafouille et s’emmêle les pin­ceaux dans ses expli­ca­tions.
Derrière ces asso­cia­tions, tou­jours les mêmes : les Identitaires.
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Manifestation des identitaires à Paris le 23/10/2010.
Rebeyne à Lyon, Nissa rebela à Nice ou Projet apache à Paris, il s’agit en réa­lité des anciens grou­pes des Jeunesses Identitaires : même diri­geants, mêmes mili­tants, mêmes types de pro­pa­gande, pré­sen­tés aujourd’hui comme des grou­pes com­plè­te­ment auto­no­mes et plus axés sur des thé­ma­ti­ques régio­na­lis­tes.
Cette nou­velle déno­mi­na­tion tente de dif­fé­ren­cier dans l’opi­nion publi­que les « Jeunesses Identitaires » du « Bloc Identitaire ». Les pre­miers ayant vu leur pré­si­dent, Phillipe Vardon, condamné par la cour d’appel d’Aix-en Provence pour recons­ti­tu­tion de ligue dis­soute en sep­tem­bre 2008. Le Bloc Identitaire, aux pré­ten­tions électoralistes, ne désire évidemment pas qu’on se rap­pelle le passé des mem­bres des deux struc­tu­res au sein d’Unité Radicale, dis­soute par déci­sion de jus­tice suite à la ridi­cule ten­ta­tive d’assas­si­nat de Jacques Chirac par l’un de ses membre, Maxime Brunerie.
Les Jeunesses Identitaires ne se sont pas pour autant trans­for­més en grou­pes indé­pen­dants, la struc­ture natio­nale a dis­paru devant une autre appe­lée « Une autre Jeunesse » dont la prin­ci­pale appa­ri­tion s’est résu­mée en une mani­fes­ta­tion de 250 per­son­nes à Paris en octo­bre der­nier. Côté déci­sion­nel, les ordres et la hié­rar­chie interne à ces grou­pes res­tent sen­si­ble­ment les mêmes.
Ces chan­ge­ments de déno­mi­na­tion, de struc­tu­res, et par­fois même de choix stra­té­gi­ques met­tent tou­jours en avant la même pro­pa­gande, cen­trée essen­tiel­le­ment sur le tryp­ti­que immi­gra­tion, islam et sécu­rité, si cher à l’actuel gou­ver­ne­ment. Autant dire que la poli­ti­que actuelle leur offre une vul­ga­ri­sa­tion de leurs idées à peu de frais... Prenons un moment pour reve­nir sur les gran­des lignes de leur idéo­lo­gie.
Identitaires ? Du réchauffé idéo­lo­gi­que sous une couche de publi­cité.
Passons sur le dis­cours policé sur l’iden­tité euro­péenne, natio­nale et régio­nale qui masque mal un racisme vis­cé­ral, l’absur­dité de parler d’« iden­tité char­nelle » comme ils le font nous parait assez claire sur le fond. Cherchons plutôt du côté des prin­ci­pes théo­ri­ques (l’ethno-dif­fé­ren­cia­lisme, expli­ca­tion sur wiki­pe­dia rela­ti­ve­ment biai­sée, on revien­dra plus tard sur cette notion par­ta­gée en partie par d’autres grou­pes consi­dé­rés comme « de gauche ») et de leurs sour­ces (la Nouvelle Droite, la Nouvelle Revue d’Histoire, etc.).
Ces théo­ries ne sont pas arri­vées par hasard au sein de l’extrême-droite. Conscients que se trim­bal­ler les vieux refrains éculés d’une extrême-droite plus tra­di­tion­nelle n’est pas vrai­ment ven­deur, les iden­ti­tai­res pio­chent du côté de la Nouvelle Droite, émanation du GRECE (pour Groupement de recher­che et d’études pour la civi­li­sa­tion euro­péenne. Dépasser le natio­na­lisme par l’iden­tité euro­péenne, tout en s’oppo­sant à l’Union Européenne. Depuis la fin des années 60 l’extrême-droite s’essaie, sans grand succès, à l’inter­na­tio­na­lisme régio­na­lisé en res­sor­tant le vieux fan­tasme d’un peuple euro­péen cohé­rent. C’est aussi le GRECE qui a élaboré au début des années 70 la théo­rie de la « méta­po­li­ti­que » qui pousse les iden­ti­tai­res et d’autres à mul­ti­plier les asso­cia­tions pour « faire de la poli­ti­que hors de la poli­ti­que » : l’idée de base de cette théo­rie était de contre­car­rer le fait que leurs idées n’ont pas d’échos posi­tifs dans la popu­la­tion quand elles appa­rais­sent clai­re­ment. On retrouve ainsi parmi les ins­pi­ra­teur des iden­ti­tai­res des anciens du GRECE comme Guillaume Faye.
La per­cep­tion socio­lo­gi­que, anthro­po­lo­gi­que, des iden­ti­tai­res est donc des plus nau­séa­bon­des. Leur per­cep­tion his­to­ri­que vaut également le détour. Développant une fas­ci­na­tion pour le « roman natio­nal », notam­ment à tra­vers la vision biai­sée que peut donner de l’his­toire des revues aussi peu sérieu­ses que la NRH (Nouvelle Revue d’Histoire), les iden­ti­tai­res s’ins­cri­vent dans la droite ligne de l’extrême-droite fran­çaise, celle qui n’a jamais réussi à pren­dre pied chez les his­to­riens et les archéo­lo­gues en raison de sa vision archaï­que de l’his­toire natio­nale. Mais les iden­ti­tai­res ont également mis en avant une volonté de s’appro­prier des sym­bo­les his­to­ri­ques plus mar­qués à gauche, plus popu­lai­res, comme les canuts à Lyon ou les apa­ches à Paris. La situa­tion donne des résul­tats sur­pre­nant puis­que par exem­ple le 8 décem­bre, les iden­ti­tai­res se récla­mant des révol­tés du XIXe siècle lyon­nais en fêtent les bour­reaux [3]. Dur de trou­ver une cohé­rence his­to­ri­que là-dedans...

Rebelles, mais pas trop....
Finissons sur une note iro­ni­que, si les iden­ti­tai­res aime­raient être les apa­ches de notre société, il n’en oublient pour­tant pas d’appe­ler « la police avec nous » alors qu’ils mani­fes­taient dans les rues de Lyon après les émeutes (on ne les a guère vus venir nous voir pen­dant). Ces rebel­les moder­nes venaient donc « aider la police » à « finir le tra­vail ».
Ils sont tel­le­ment rebel­les qu’ils en vien­nent doré­na­vant à par­ti­ci­per aux élections, à l’image de leurs modè­les ita­liens (la Ligue du Nord). Ainsi le Bloc Identitaire, la struc­ture « propre », s’est-elle implan­tée à Lyon en plus de Rebeyne, et elle par­ti­cipe déjà ailleurs aux élections loca­les. Après avoir par­ti­cipé aux élections à Nice (seule élection où leur score ne fut pas ridi­cule) ils avaient annoncé la can­di­da­ture d’un « jeune euro­péen de souche » aux élections pré­si­den­tiel­les de 2012, c’est chose faite, et ce vain­queur en puis­sance si jamais il arrive à ras­sem­bler les 500 signa­tu­res, ne sau­rait mena­cer que Marine le pen, et sûre­ment pas l’UMP. Au jeu de « à qui pro­fite », l’UMP doit bien se marrer…
On pour­rait passer des heures à détailler leur évolution poli­ti­que, notam­ment le pas­sage de cer­tains de leurs mem­bres de l’anti­sé­mis­tisme d’Unité Radicale au pro-sio­nisme, leur logi­que vis-à-vis du marché du RAC (Rock against Communism) autour du label Alternatives, ou encore leurs ten­ta­ti­ves d’implan­ta­tion dans les milieux hools… Mais ils ne valent pas la peine que nous nous étendions ici sur ces points, tout juste cet arti­cle aura-t-il eu pour but de remet­tre dans un contexte plus large l’ini­tia­tive Lugdunum suum, ceux qui dési­re­raient aller plus loin trou­ve­ront ci-des­sous des liens pour appro­fon­dir la ques­tion.
Aujourd’hui comme hier : No pasa­ran !
Pas de fachos dans nos quar­tiers,
Pas de quar­tier pour les fachos !


Des liens pour aller plus loin :
- Un arti­cle de nos cama­ra­des de RELEXes, docu­menté, écrit en 2007 et mis à jours en 2010, tente une syn­thèse sur les iden­ti­tai­res : Identitaires, Bloc Identitaire, Jeunesses Identitaires : La soupe aux Vardon
Sur le même site, d’autres arti­cles sur la ques­tion :
- De l’apéro sau­cis­son-pinard au ras­sem­ble­ment du 18 juin : retour sur une mani­pu­la­tion réus­sie du Bloc Identitaire
- Une Autre Jeunesse ? (retour sur la cam­pa­gne éponyme et la mani­fes­ta­tion pari­sienne)
- Pour une his­toire des iden­ti­tai­res avant les iden­ti­tai­res, lire :
Collectif, Bêtes et méchants, petite his­toire des jeunes fas­cis­tes fran­çais, Paris, Éditions Reflex, 2002.
- Un autre site d’infor­ma­tion sur l’extrême-droite fran­çaise, tenue par des jour­na­lis­tes du monde : Droites Extremes
- Coté vidéo, pour une mise en pers­pec­tive des logi­ques de l’extrême-droite euro­péenne, voir le docu­men­taire Europe : ascen­seur pour les fachos (2009, Barbara Conforti & Stéphane Lepetit, Agence CAPA)
- A Lyon si les grou­pes liber­tai­res sont tous clai­re­ment anti­fas (CGA, CNT, Autonomes, etc), quel­ques uns se sont spé­cia­li­sés sur cette lutte, comme Les Voraces ou plus récem­ment le jeune groupe projet Rafal
- Au coté de REFLEXes, l’indé­mo­da­ble Barricata, zine du RASH Paris reste également une mine d’infor­ma­tion inte­res­sante.
- Pour rappel nous étions plu­sieurs mil­liers à mani­fes­ter contre les fafs le 10 Avril : Une riposte anti­fas­ciste mas­sive et déter­mi­née face aux atta­ques d’extrême-droite

Notes

[1] suum n’est pas, contrairement à ce qu’une lecture rapide pourrai laisser croire, une conjugaison du verbe être/esse, mais le pronom-adjectif possessif suus
[2] Présenté comme une agence de presse officielle, elle fait suite à la tentative d’Altermedia partagée par les identitaires français et l’extrême-droite belge. Notons que dans la course à la réacosphère il semblerai que les zids aient perdu face à Fdesouche
[3] Comme à Paris pour le Sacré Coeur, la décision de construire la basilique de Fourvière fut prise quelques semaines après l’insurrection lyonnaise de la Commune de Lyon, en 1870. Sur la Commune de Lyon, voir cet article.

http://rebellyon.info/Les-identitaires-dans-la-rue-le-8.html

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