On peut dire que le Salon du Bourget est dans une période très euphorique pour le marché aéronautique, où les prévisions de trafic sont extrêmement importantes. Depuis le début de l'année, Airbus avait enregistré deux fois moins de commandes que Boeing. On peut parler d'un effet rattrapage dans ce Salon. Et ça concerne toute la gamme, notamment l'A380.Le chiffre annoncé aujourd'hui par Airbus est de 425 commandes fermes de 19 compagnies. Avec 13 achats ou intentions d'achat d'A380. Ces prises de commandes considérables – du jamais vu dans l'histoire du Bourget – ont un double effet. Elles montrent qu'Airbus est toujours très présent face à Boeing, c'est le côté positif. Le problème essentiel, c'est de respecter le calendrier et de fabriquer dans les temps.Les sites européens pourraient ne pas profiter de cette manne si l'euro reste fort, car il faudra alors intensifier la délocalisation de la production vers des pays en zone dollar. Autre effet imprévu pour la direction d'Airbus : les syndicats ont demandé à revoir le plan Power 8, qui prévoit 10 000 suppressions d'emplois.
Le danger est que l'A380 ne devienne le Concorde du XXIe siècle, en ne trouvant pas suffisamment d'acheteurs. Cet avion est conçu pour transporter les voyageurs d'un "hub" (gros aéroport) vers un autre "hub". Ils doivent ensuite changer pour aller vers leur destination finale. La volonté des gens aujourd'hui est de voyager sur des vols directs sans avoir à faire de changement. Les deux ans de retard dans la fabrication ont ralenti les ventes sans toutefois faire perdre de contrats. Les compagnies attendent maintenant de voir si le nouveau calendrier sera vraiment respecté. Il est indispensable qu'Airbus tienne ses délais, sinon cet avion géant est condamné. C'est pour cela que la première livraison est très attendue ; elle aura lieu vraisemblablement à partir de septembre à Singapore Airlines.
Dominique Gallois, journaliste du Monde spécialiste d'aéronautique
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