31/12/2007

Vulgarité !!!

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Sarkozy réinvente la France pour une époque clinquante

De John Lichfield, à Paris

La monarchie républicaine inventée par Charles de Gaulle - distante, discrète, solennelle, hautaine - a disparu la semaine dernière, quelque part entre le château de Cendrillon et Space Mountain.
lundi 31 décembre 2007 (13h03) :
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Nicolas Sarkozy veut réinventer la France pour le 21ème siècle. Il a commencé par réinventer la présidence française pour l’ère de la célébrité. Le Président de la République est devenu l’hôte d’un talk-show permanent, le seul concurrent dans la maison de "Big Brother" qui s’appelle le Palais de l’Elysée ; la vedette d’un feuilleton télévisé, qui - ainsi que Le Monde l’a souligné - a commencé comme Desperate Housewives [Les épouses désespérées] et menace à présent de devenir Amour, Gloire et Beauté.

Le quotidien de centre-gauche Libération décrit M. Sarkozy comme un "président clinquant", une confusion non-stop de micros, de séances photos, de yacht de millionnaires, de montres Rolex, de lunettes moires, de téléphones mobiles, de shorts de sport et, désormais, de petites-amies trophées.

M. Sarkozy, qui a divorcé il y a deux mois, a emmené le top-modèle devenue chanteuse, Carla Bruni, à Euro Disney le week-end dernier et s’est assuré que cette joyeuse nouvelle apparaît dans les journaux et les magazines du monde entier.

Le casanier en pantoufles Charles de Gaulle ne serait jamais, en toute circonstance, sorti avec une magnifique pop star et ancien modèle franco-italienne.

L’élégant et machiavélique François Mitterrand aurait pu le faire, en secret, mais il ne se serait jamais mélangé à la foule d’Euro Disney. Jacques Chirac est sans aucun doute sorti avec des quantités de chanteuses-pop italiennes mais n’a jamais encouragé les paparazzis à les prendre en photo.

A la fin de la semaine, le Président deux fois divorcé s’est envolé pour rendre visite au Pape Benoît XVI.

Le Président a salué le Pape allégrement comme un vieil ami et, ensuite, tandis que sa délégation officielle était présentée à Sa Sainteté, il a impoliment vérifié son téléphone mobile. L’entourage de Sarkozy incluait Jean-Marie Bigard, à la fois catholique dévot et comique français le plus populaire et le plus grossier.

Dans le groupe présidentiel, il y avait aussi la mère de Carla Bruni. M. Sarkozy voulait visiblement emmener Carla Bruni avec lui à Rome, en tant que "première petite-amie" officielle, mais le Vatican a pensé que cela allait trop loin. Après tout, Mme Bruni, qui a 39 ans, est divorcée.

Dans un discours, après avoir accepté une canonisation honorifique, M. Sarkozy, qui va très rarement à la messe, a déclaré : "Dans ce monde, obsédé par le confort matériel, la France a besoin de Catholiques dévots qui n’ont pas peur de dire ce qu’ils sont et en quoi ils croient".

Il a aussi insisté sur le fait que les racines françaises sont "essentiellement catholiques".

D’un côté, se fut un discours riche en réflexion et courageux, qui défendait l’idée que les valeurs chrétiennes et les valeurs laïques n’avaient pas besoin d’être en conflit.

D’un autre, M. Sarkozy a fait voler en éclat la convention selon laquelle les présidents français, en tant que haut représentants de la république française laïque, ne devraient pas défendre ou encourager une religion par rapport aux autres. La gauche française était incandescente et le Président savait qu’elle le serait.

Tout ceci est du pur Sarko. Tout est fait en confiance, à la va-vite ; tout est exécuté avec (métaphoriquement) un miroir ou une caméra vidéo compacte à la main. Confusion des genres, mélange des valeurs, piétinement des conventions.

Le réalisateur de cinéma français et commentateur politique occasionnel, Claude Chabrol, dit qu’il ne voit là rien de mal, en principe, au changement de style présidentiel.

Le vieux numéro de Mitterrand et de Chirac - Je suis tout-puissant mais pas responsable - commence à être usé. Mais où Sarkozy va-t-il, demande Chabrol ? Les réformes économiques innovatrices très claironnées ont été jusqu’à présent plutôt modestes. "Il y a peut-être un plan mais il semble qu’il soit complètement improvisé", a déclaré Chabrol. "C’est un homme intelligent qui réfléchit peu".

Le Monde et Libération ont tous deux eu recours au mot snob en "V", vulgarité, pour décrire le comportement de M. Sarkozy. Il y a quelque chose de vulgaire chez M. Sarkozy, mais sa vulgarité et son énergie sont inséparables. Il ne fait pas partie de la classe dirigeante française traditionnelle : supérieure sans effort, sobre, fondamentalement sans initiative, soutenue par le "vieil argent" ou les certitudes administratives des Grandes Ecoles.

Il représente une Nouvelle France de média, de publicité et d’argent : bravache, faisant sa promotion personnelle et pleine d’énergie et d’idées - pas toujours bonnes.

Il reste à voir si la "Sarkonomie" ou le programme Sarko de réformes vaut grand-chose. Le style Sarko présage l’émergence - pour le meilleur ou pour le pire - d’une France plutôt non-française : moins subtile mais moins hypocrite ; vaniteuse mais pas si arrogante, tape-à-l’œil mais moins liée aux traditions. Il s’avère que c’est un choc culturel brutal, pas seulement à gauche, mais pour beaucoup de gens en France qui voteraient naturellement à droite et soutiendraient un président de centre-droit.

La France pourrait ne plus jamais être tout à fait la même mais, après tout, c’est ce que Nicolas Sarkozy a promis.

Traduction JFG-QuestionsCritiques

The Independent, 24 décembre 2007
article original : "Sarkozy reinvents France for bling era"

De : John Lichfield
lundi 31 décembre 2007



1 commentaire:

Anonyme a dit…

Monsieur Lichfield oublie (entre autres choses) dans sa description du "fonctionnement" de Sarkozy, sa proximité avec les grands patrons et avec le monde de l'Argent. Il est la "courroie de transmission" du MEDEF.

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