Zoé : c’est la France qui paiera … et il n’y a pas beaucoup de doute. Chers amis contribuables préparez vos chéquiers.
Zoé : c’est la France qui paiera … et il n’y a pas beaucoup de doute. Chers amis contribuables préparez vos chéquiers.
Que quoi s’agit-il ? des suites d’une condamnation pénale. Il faut donc distinguer, chose qui n’est pas toujours faite, les amendes, qui sont des condamnations pénales destinées à l’Etat et les dommages et intérêts, destinés à l’indemnisation des victimes. En l’occurrence, les 6 millions d’euros ne sont pas destinés à l’Etat tchadien au titre d’une amende, mais bien aux victimes reconnues partie civile dans le procès. C’est donc une créance des particuliers, les familles, à l’encontre d’autres particuliers, les condamnés. Le procès pénal combine la sanction pénale et l’indemnisation des victimes.
Ensuite, vient la question de la grâce. La grâce est limitée dans ses effets. Elle ne remet pas en cause la condamnation mais seulement l’exécution de la peine. Cette condamnation a d’ailleurs été validée par le droit français et elle reste au plan pénal comme au plan civil. Un gracié n’est pas innocenté. D’une manière générale, l’action civile est plus coriace que l’action pénale. Lorsqu’il y a amnistie la sanction pénale est effacée, mais reste la dette civile. Aussi, il ne fait aucun doute que la grâce accordée par le Président tchadien Idriss Deby ne remet pas en cause le paiement des dommages et intérêts.
Vient alors l’accord entre la France et le Tchad. Il y a lieu ici d’être prudent, car la lecture du Traité ne dit pas grand-chose. Mais la lettre du Ministre de la justice Albert Pahini Padacké, qu’a publié le Figaro, adressée à Rachida Dati dit beaucoup « Au regard des dispositions de l’article 29 de l’accord franco-tchadien n° 138/CSM du 6 mars 1976 relatif à l’entraide judiciaire, nous marquons notre accord pour le transfèrement vers la France en vue d’y purger leur peine. Ce transfèrement n’éteignant pas le paiement des dommages et intérêts, il est entendu que l’Etat français requérant garantit l’effectivité du paiement desdits intérêts civils ».
Une pièce du puzzle, importante, mais on ne connaît pas les autres pièces et notamment pas la réponse du gouvernement.
Ce qui ressort de cette lettre, c’est que l’Etat français ne s’est pas seulement engagé à faire le maximum pour obtenir le paiement en lieu et place de ce qu’aurait pu faire l’Etat tchadien, mais qu’il en devient le « garant en vue d’un paiement effectif ». De telle sorte, la France est bien engagée, non pas comme débiteur principal, c’est le cas des condamnés, mais comme caution.
Ainsi, dans un premier temps des huissiers seront mandatés pour aller frapper à la porte des 6 condamnés afin de leur demander le paiement des 6 millions d’euros … L’huissier peut faire beaucoup de chose, mais il n’a pas la possibilité de créer la richesse, et il constatera donc très rapidement l’insolvabilité, ou en tout cas l’impossibilité de recouvrer la dette dans un délai crédible.
Jouera alors la garantie de l’Etat. Cela se fera sans doute dans le temps, loin des lumières, mais cela se fera inévitablement. La diplomatie aidera.
En outre, cela est-il véritablement choquant ? Au premier degré oui, car comme le dit si bien notre premier Ministre, ce n’est pas à l’Etat de payer pour des fautes qu’il n’a pas commises. A ceci près, c’est ce que prévoit pourtant la loi. C’est l’objet de la loi n° 90 589 du 6 juillet 1990, que l’on retrouve désormais dans le Code de procédure pénal aux articles 706-3. Toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits qui présentent le caractère d’une infraction peut obtenir réparation intégrale des dommages en s’adressant à un fonds, le fonds d’indemnisation des victimes, qui est alimenté par des caisses publiques. C’est une mesure qui avait été prise en faveur des victimes, tant il semblait insupportable que la victime se trouve dans l’impossibilité d’accéder à l’indemnisation car son agresseur était impécunieux. C’est donc l’Etat qui se substitue et qui paie. Dans l’esprit de la loi l’Etat exerce ensuite une action récursoire, c’est-à-dire qu’il se fait rembourser par les auteurs de l’infraction. Avec un résultat souvent très aléatoire.
Sauf disposition conventionnelle, inconnue à ce jour, la loi de 1990 n’est pas applicable à des faits commis à l’étranger au détriment de victimes de nationalité étrangère. Mais l’idée que l’Etat paie pour les faits commis par les délinquants est une notion qui est inscrite dans la loi depuis 1990, et qu’on fait semblant de découvrir aujourd’hui.
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