01/06/2008

la promesse de régularisation d’un étudiant s’envole

Partager


a lire aussi(recapitulatif): http://torapamavoa.blogspot.com/2008/05/expulsion.html

C’est une petite histoire bien kafkaïenne, dont le scénario a été écrit par la préfecture du Rhône. Jacques Gérault, le préfet, ancien directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy à l’Intérieur, a fait expulser un étudiant de 23 ans, tout en reconnaissant qu’il s’agissait d’un cas particulier, qu’il régularisera volontiers, quand le garçon reviendra légalement…



Avant la reconduite, le représentant de l’Etat affirmait aux enseignants et camarades de classe très mobilisés que les autorités françaises en Côte-d’Ivoire étaient prévenues, afin de faciliter le retour. Mais il semble que ce n’était pas le cas. Landry Koua a 23 ans. Il explique être arrivé en 2001 en France, ce que les autorités contestent. En 2003, il serait retourné quelques mois au pays mais son père a été assassiné à cette période-là. Lui-même aurait fait quelques mois de prison, avant de revenir avec un passeport d’emprunt. Il a demandé l’asile politique, qui lui a été refusé. Cela ne l’a pas empêché de mener une scolarité normale. Un bac S, deux ans de physique-chimie, avant de se réorienter l’an dernier en BTS de gestion informatique, au lycée La Martinière, à La Duchère, quartier populaire lyonnais.

Stage. Le 10 mai, il a été arrêté près d’une station de métro. Son lycée s’est très progressivement soulevé, jusqu’à bloquer l’établissement, avec plusieurs centaines d’élèves révoltés au petit matin, la veille de l’expulsion. «Landry, c’est quelqu’un de très généreux, d’ouvert, sans histoire», expliquait l’un de ses copains, haranguant la foule avec un plot de chantier, en guise de haut-parleur : «C’est un citoyen modèle, qui veut réussir son BTS et travailler ici.» Roger Sanchez, professeur de Landry, ajoutait que le garçon «n’est pas spécialement brillant, mais très bosseur, il veut vraiment décrocher son BTS». Il devait commencer un stage quatre jours avant son expulsion, pour valider son année. Pierre-Alain Muet, député socialiste du Rhône, s’est démené pour essayer d’empêcher l’expulsion. Il s’en est entretenu avec le préfet. «Il m’a dit qu’effectivement, c’était un cas qui méritait d’être examiné et qu’il allait faire ce qu’il fallait», raconte le parlementaire.

Mais l’expulsion a été maintenue. «Pour régulariser sa situation, écrivait le préfet vendredi 23 mai, il doit d’abord retourner dans son pays afin de demander aux autorités consulaires françaises en Côte-d’Ivoire un visa de long séjour "étudiant". Après obtention de ce visa, il pourra revenir sur le territoire français et obtiendra un titre avec la mention étudiant.» Et le préfet ajoutait que «pour faciliter l’obtention rapide d’un visa», l’ambassade en Côte-d’Ivoire avait été «avisée de ce cas particulier».

Consulat. Mais si Landry a été expulsé samedi dernier comme convenu, les autorités françaises à Abdijan n’ont pas été alertées. L’étudiant s’est rendu, lundi matin, au consulat général de France. Personne n’avait entendu parler de son histoire. «Ils n’étaient pas du tout au courant, racontait Landry, au téléphone, en sortant du consulat. Ils m’ont dit qu’il fallait écrire pour demander un rendez-vous.» La préfecture du Rhône affirme pour sa part qu’un contact avait été établi avec le consulat le 16 mai pour «l’informer de la procédure envisagée pour permettre à monsieur Koua de reprendre ses études au plus vite». Le député Muet a alors envoyé un mail au consul général et il a joint le communiqué dans lequel le préfet expliquait que l’ambassade était prévenue. Le consul lui a répondu qu’un visa «ne saurait être délivré sur le seul fondement d’un communiqué de presse». Mais il a écrit au préfet, pour lui demander un courrier. Ce dernier le lui a faxé en retour. «Il convient maintenant que M. Koua, après avoir constitué un dossier de demande de visa pour études conforme aux exigences de notre réglementation, suive la procédure de dépôt de sa demande auprès de mes services», poursuit le consul, qui a rencontré le garçon vendredi.

Landry patiente, mais il s’inquiète du stage annulé, et de la validation de son année scolaire. Le conseil d’aministration de son lycée a voté, jeudi soir, une motion demandant que le garçon soit automatiquement inscrit en deuxième année (lire ci-contre). Une quête a été lancée, pour l’aider à vivre là-bas, à préparer les papiers. Et pour payer son billet retour.

Ol.B.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire